L'Afep et le Medef finalisent un nouveau code de bonnes pratiques

Par Yann Le Galès.

Alors que Bercy semble lâcher du lest sur la rémunération des dirigeants et la gouvernance des entreprises, les patrons avancent leurs propres propositions de régulation.

Les patrons sont soulagés. Ils échappent à une loi encadrant leur rémunération et sur la gouvernance des entreprises. Farouches défenseurs de l'autorégulation, le Medef et l'Afep - qui défend les grandes entreprises -, réfléchissent depuis plusieurs mois à la mise en place de nouvelles règles de gouvernance. Les deux organisations patronales ont décidé d'actualiser le code «Afep-Medef» dont la première version, qui date de 2008, avait été rédigée pour éviter une loi, déjà!

Leurs dirigeants ont rencontré des associations d'actionnaires et d'investisseurs. Ils ont travaillé en concertation avec le ministère de l'Économie et l'Autorité des marchés financiers (AMF). Ils ont aussi tenu compte des recommandations du rapport sur la gou­­­vernance des entreprises présenté en février par les députés Jean-Michel Clément et Philippe Houillon. Sauf difficulté de dernière minute, l'Afep et le Medef dévoileront leur nouveau code de gouvernance d'ici fin juin ou au plus tard le 14 juillet.

Les limites du «Say on Pay»

Leur principal objectif? Se réconcilier avec l'opinion publique. Elles proposeront de soumettre la politique de rémunération des dirigeants au vote consultatif des actionnaires lors des assemblées générales. Ce système dit «Say on Pay» a déjà été adopté par de nombreux pays: en 2011, aux États-Unis, tandis que le Canada le pratique de plus en plus sans l'avoir rendu obligatoire par une loi. En Europe, le Royaume-Uni l'a choisi en 2002. La Suède, la Norvège, la Belgique, l'Allemagne ont suivi son exemple. La Suisse est le pays européen qui a pris la position la plus radicale. 67,5 % des électeurs suisses ont voté le 3 mars «contre les rémunérations abusives».

En France, l'AMF y est favorable. «Les investisseurs internationaux demandent de plus en plus le Say on Pay pour accroître la sensibilité des rémunérations à la performance de l'entreprise», explique Guillaume de Piédoüe, directeur général d'Ethics & Boards, un observatoire sur la gouvernance des sociétés cotée.

Mais, contrairement aux affirmations de ses partisans, selon qui ce dispositif permet d'éviter une envolée des rémunérations, le Say on Pay n'a pas ralenti la croissance des rémunérations ni mis fin aux excès. Selon Ethics & Boards, la rémunération des patrons britanniques a crû de 70 % depuis sa mise en place il y a onze ans. Les rémunérations des dirigeants des États-Unis, du Royaume-Uni et d'Allemagne sont supérieures à celles du Cac 40.

L'Afep et le Medef proposent également de créer une instance de contrôle chargée de veiller à l'application du nouveau code de gouvernance. Pierre Pringuet, président de l'Afep, a déclaré que ce comité «serait construit sur le mode de l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité chargée de contrôler la publicité». Il devrait être composé de dirigeants, de juristes, de spécialistes de la fiscalité et d'autres experts. Les patrons tirent les leçons du comité des sages créé en avril 2009 par l'Afep et le Medef dont l'action s'est finalement révélée très limitée. Ce comité était composé de quelques patrons, et ses décisions demeuraient confidentielles. Un mode d'action qui n'est plus adapté quand les actionnaires, les salariés et les responsables politiques font monter la pression.
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